Fro
« Depuis le 1er juin, les médecins demandant un transfert à l’étranger pour un de leurs patients, doivent utiliser un nouveau formulaire de la CNS. Sur ce document, le médecin doit obligatoirement choisir entre trois options pour attester par sa signature, que les prestations dont la prise en charge est demandée
- ne peuvent être dispensées à la personne protégée au Luxembourg dans un délai acceptable sur le plan médical, compte tenu de son état actuel de santé et de l’évolution probable de sa maladie.
- peuvent être dispensées à la personne protégée au Luxembourg dans un délai acceptable sur le plan médical, compte tenu de son état actuel de santé et de l’évolution probable de sa maladie. La demande émane de la demande expresse de la personne protégée qui souhaite se rendre à l’étranger pour la dispensation des prestations en question.
- sont directement liées à un suivi d’un traitement initié auprès du prestataire étranger repris sous le point n°1 ci-avant et opposable à l’assurance maladie, et sont envisagées dans le cadre du suivi de ce traitement
Le service transfert à l’étranger de la CNS informe actuellement les médecins que, s’ils cochent l’option b), ceci entraîne automatiquement un refus de la demande de la part de la CNS au motif que « les prestations peuvent être dispensées à la personne protégée au Luxembourg dans un délai acceptable sur le plan médical, compte tenu de son état actuel de santé et de l’évolution probable de sa maladie ».
Dans ce contexte, j’aimerais poser les questions suivantes à Madame la Ministre de la Santé et de la Sécurité sociale :
- Est-ce que la focalisation exclusive sur le « délai acceptable » et le simple fait qu’une prestation soit dispensée à Luxembourg, sans tenir compte ni de la qualité ni de la fréquence à laquelle ces soins sont offerts à Luxembourg, ne risque pas de conduire à des refus injustifiés pour des patients ?
- Est-ce que Madame la Ministre peut reconnaître que ce formulaire risque de pousser des médecins à faire de fausses déclarations et s’exposer à des sanctions disciplinaires alors qu’ils agissent dans l’intérêt légitime de leur patient s’ils estiment qu’une prise en charge dans un centre spécialisé à l’étranger est mieux indiquée médicalement et offre de meilleures chances de guérison, quitte à ce que la prestation soit également dispensée à Luxembourg dans un délai acceptable ?
- Quelles mesures Madame la Ministre compte-elle prendre pour corriger les lacunes de ce formulaire ?»
Äntwert
- Est-ce que la focalisation exclusive sur le « délai acceptable » et le simple fait qu’une prestation soit dispensée à Luxembourg, sans tenir compte ni de la qualité ni de la fréquence à laquelle ces soins sont offerts à Luxembourg, ne risque pas de conduire à des refus injustifiés pour des patients ?
Il convient de préciser que la demande d’autorisation préalable d’un transfert à l’étranger, à remplir par les médecins, trouve sa source dans le règlement (CE) No 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (ci-après « règlement 883/2004 ») ainsi que dans l’article 20 du Code de la sécurité sociale (ci-après « CSS »).
Il ressort de l’article 20 du règlement 883/2004 que « 1. À moins que le présent règlement n’en dispose autrement, une personne assurée se rendant dans un autre État membre aux fins de bénéficier de prestations en nature pendant son séjour demande une autorisation à l’institution compétente.
- La personne assurée qui est autorisée par l’institution compétente à se rendre dans un autre Étatmembre aux fins d’y recevoir le traitement adapté à son état bénéficie des prestations en nature servies, pour le compte de l’institution compétente, par l’institution du lieu de séjour, selon les dispositions de la législation qu’elle applique, comme si elle était assurée en vertu de cette législation. L’autorisation est accordée lorsque les soins dont il s’agit figurent parmi les prestations prévues par la législation de l’État membre sur le territoire duquel réside l’intéressé et que ces soins ne peuvent lui être dispensés dans un délai acceptable sur le plan médical, compte tenu de son état actuel de santé et de l’évolution probable de la maladie. […] ».
Au regard de cet article, il y a lieu de constater qu’une autorisation préalable ne peut être émise que lorsque les soins sollicités relèvent des prestations de soins de santé énumérées à l’article 17, alinéa 1er du CSS et ne peuvent être dispensés dans un délai acceptable au Luxembourg.
En ce sens, l’article 20, paragraphe 2, alinéa 3 du CSS dispose que : « Toutefois, la Caisse nationale de santé ne peut refuser d’accorder une autorisation préalable :
- si les prestations de soins de santé transfrontaliers font partie de la prise en charge de l’article 17, alinéa 1, mais que ces prestations ne peuvent pas être dispensées sur le territoire luxembourgeois dans un délai acceptable sur le plan médical, suivant évaluation par le Contrôle médical de la sécurité sociale sur base des critères fixés dans les statuts, ou
- si les prestations de soins de santé transfrontaliers, indispensables suivant avis du Contrôle médical de la sécurité sociale, ne sont pas prévues par la législation luxembourgeoise. ».
Par ailleurs, l’article 27, paragraphe 2, dernier alinéa, dernier point des statuts de la CNS prévoit conformément au règlement 883/2004 et au CSS que « La demande d’autorisation présentée sur le formulaire type repris à l’annexe L des présents statuts contient au moins les renseignements suivants: […]
• l’attestation que les prestations ne peuvent être dispensées à la personne protégée au Luxembourg dans un délai acceptable sur le plan médical, compte tenu de son état actuel de santé et de l’évolution probable de la maladie. La motivation détaillera les antécédents médicaux du patient, l’évolution probable de sa maladie, le degré de sa douleur et de la nature de son handicap au moment de la demande. ».
De ce fait, la demande d’autorisation préalable d’un transfert à l’étranger applicable jusqu’au 31 mai 2025 prévoyait que « Par sa signature, le médecin atteste que les prestations dont la prise en charge est demandée ne peuvent être dispensées à la personne protégée au Luxembourg dans un délai acceptable sur le plan médical, compte tenu de son état actuel de santé et de l’évolution probable de sa maladie. ».
La nouveauté introduite dans le nouveau formulaire de demande d’autorisation préalable de transfert à l’étranger réside dans le fait que le médecin doit désormais cocher l’option correspondant à l’état de santé de son patient, parmi les trois suivantes :
- les soins demandés soit ne peuvent pas être dispensés dans un délai acceptable au Luxembourg; – les soins demandés peuvent être dispensés dans un délai acceptable au Luxembourg;
- les soins demandés s’inscrivent dans le cadre d’un suivi de traitement initié auprès d’un prestataire étranger.
Il y a lieu de constater que cette demande est conforme au règlement 883/2004 et au CSS et qu’aucune modification n’a été apportée aux principes qu’il appartient au médecin de déterminer avec précision les soins de santé qu’il estime nécessaires, compte tenu de l’état de santé de son patient et de l’évolution probable de sa maladie, et si ces derniers peuvent ou non être dispensés au Luxembourg dans un délai raisonnable.
Ainsi, l’autorisation préalable ne sera refusée que s’il est constaté que les soins demandés ne sont pas susceptibles d’une prise en charge en vertu des articles 17 et 23 du CSS ou s’ils peuvent être obtenus au Luxembourg dans un délai acceptable avec le même degré d’efficacité.
2) Est-ce que Madame la Ministre peut reconnaître que ce formulaire risque de pousser des médecins à faire de fausses déclarations et s’exposer à des sanctions disciplinaires alors qu’ils agissent dans l’intérêt légitime de leur patient s’ils estiment qu’une prise en charge dans un centre spécialisé à l’étranger est mieux indiquée médicalement et offre de meilleures chances de guérison, quitte à ce que la prestation soit également dispensée à Luxembourg dans un délai acceptable ?
Conformément à l’article 7, alinéa 1er du Code de déontologie des professions de médecin et de médecindentiste (ci-après « Code de déontologie ») « L’exercice de la médecine est personnel ; chaque médecin est responsable de ses décisions et de ses actes. ».
L’article 9 du Code de déontologie précise encore que : « Le médecin est libre de ses prescriptions, qui seront celles qu’il estime les plus appropriées en la circonstance. Il doit, sans négliger son devoir d’assistance morale, limiter ses prescriptions et ses actes à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l’efficacité des soins. ».
Le médecin est ainsi responsable des décisions et des actes qu’il accomplit. Il lui appartient selon les circonstances, et compte tenu de l’état de santé de son patient, de l’évolution probable de sa maladie ainsi que des données acquises de la science, de déterminer les soins de santé qu’il estime appropriés pour son patient, tout en limitant ses prescriptions à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l’efficacité des soins.
L’article 34 du Code de déontologie dispose que « L’exercice de la médecine comporte normalement pour le médecin la rédaction de certificats, d’attestations et de rapports dont la production est soit prescrite par la loi et les règlements, soit sollicitée par le patient ou son ayant droit.
Dans la rédaction de ses certificats et rapports, le médecin veillera à bien distinguer entre ses constatations, les dires du patient ou des tiers et les autres éléments du dossier.
Les documents doivent être rédigés avec prudence et discrétion, de façon correcte et lisible, être datés, permettre l’identification du signataire et comporter la signature du médecin.
Le médecin est seul habilité à décider du contenu de ces documents qui engagent sa responsabilité.
Il ne devra céder à aucune demande abusive. Ses documents engagent la responsabilité de l’auteur. » et l’article 35, alinéa 1er dudit Code indique que « La délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance est interdite. ».
Le médecin est donc responsable de la rédaction de toute demande qui émane de sa part et doit veiller à ce que cette dernière respecte les données acquises par la science. Il ne doit pas céder à des demandes abusives ou à des demandes de complaisance. Dans le cas contraire, il engage sa responsabilité.
3) Quelles mesures Madame la Ministre compte-elle prendre pour corriger les lacunes de ce formulaire ?»
Il n’existe pas de lacunes au niveau de la demande d’autorisation préalable d’un transfert à l’étranger. Il convient d’ailleurs de préciser que ladite demande a été négociée entre la CNS et l’Association des médecins et médecins-dentistes du Grand-Duché de Luxembourg qui est le groupement représentatif des médecins et médecins-dentistes du Grand-Duché de Luxembourg.